dimanche 21 mai 2017

De Foix à Ax-les-Thermes en cinq jours

Je suis parti de Foix le 15 mai, après un (long) voyage en train depuis Paris la veille. Mon projet était de parcourir le chemin des Bonshommes (GR107) jusqu'à Mérens-les-Vals. Finalement ma randonnée s'est terminée à Ax-les-Thermes, on verra pourquoi...
Les trois premières étapes de cet itinéraire sont communes avec la fin du sentier cathare, dont j'avais découvert la partie centrale fin mars. Puis le GR107 bifurque vers le sud, quittant le piémont pour s'enfoncer dans les Pyrénées par les cols dominant la haute vallée de l'Ariège, sans dépasser les 1800 m d'altitude jusqu'à Mérens, donc sans trop de risque de rencontrer de la neige en cette saison.

15 mai : de Foix à Roquefixade


Après une nuit reposante à l'hôtel Eychenne (je suis arrivé à Foix un dimanche soir, et le gîte d'étape "Le Leo" est fermé le week-end, sauf réservation par des groupes d'au moins 10 personnes), c'est sous un beau ciel bleu que j'entame ma randonnée, par un temps plutôt chaud pour la saison. 
Le chemin part pratiquement du centre-ville (370 m) pour grimper vers le Pech de Foix, 500 m plus haut. Vu d'en bas, la pente paraît raide. Mais heureusement la plus grande partie de cette montée se fait par un bon sentier en versant nord-ouest et en sous-bois, ce qui permet de démarrer tranquillement sans souffrir de la chaleur. Il faut profiter d'un dernier coup d'oeil au château de Foix, car on ne le reverra plus...
Le sentier franchit la crête pour passer en versant sud vers les 700 m d'altitude, et offre ainsi une première vue sur les Pyrénées ariégeoises :

La montée se poursuit tranquillement jusqu'à la crête du Pech de Foix (860 m) où, après 1 heure 30 de marche, une première pause est la bienvenue, pour profiter du panorama, avec au sud les Pyrénées dans l'axe de la vallée de l'Ariège...
et au nord-est les collines du piémont et à l'horizon, au-delà de la plaine de Carcassonne, la Montagne Noire :
Après la courte descente vers le col de Porte-Pa, on trouve une belle piste en sous-bois, oscillant entre 800 et 900 m d'altitude en versant nord, piste qu'on quitte vers le col de Touron pour passer à nouveau en versant sud. C'est l'occasion d'une nouvelle pause face aux Pyrénées, environ 1 heure 30 après la première.
Le sentier bifurque ensuite vers le nord pour passer au pas du Falcou, puis descendre vers Leychert, en offrant au passage de jolies vues sur le massif du Tabé vers lequel on se dirigera le lendemain.

Il me faut encore environ 1 heure 30 pour arriver au petit village de Leychert. 
De là, le sentier remonte brutalement (surtout en pleine chaleur du début d'après-midi) de 200 mètres, pour longer ensuite par son versant sud la petite crête qui mène au rocher en-haut duquel on devine les ruines du château.
Une courte descente conduit alors au village de Roquefixade (780 m), où j'arrive avec soulagement au bout de près de 6 heures de marche, pour un dénivelé ascendant d'environ 900 mètres et une distance de 18 km.
Je trouve le gîte d'étape fermé, mais pas d'inquiétude: un coup de téléphone m'apprend que le gérant est descendu faire des courses et sera de retour dans une heure.


Le village est agréable, avec une jolie place égayée d'une fontaine devant l'église. Au loin on aperçoit la pyramide du Pog de Montségur (à peu près au centre de la photo), sur lequel on peut même deviner la silhouette du château, but de l'étape du lendemain.

Soirée sympathique au gîte d'étape, autour d'un bon et copieux repas préparé par le gérant, cuisinier de métier, et partagé avec les autres hôtes: un couple scandinave (lui Norvégien, elle Danoise) un peu plus âgé que moi, et deux Hollandais, père et fils. Cerise sur le gâteau: ça m'aura fait réviser mon anglais...
Adresse à retenir, même si vous n'êtes que de passage à Roquefixade sans y dormir : le gîte fait également buvette et restaurant (sauf les lundi et mardi), avec une belle terrasse.

16 mai : de Roquefixade à Montségur


A part le début par un bon chemin à flanc jusqu'à Coulzonne, face au massif du Tabé,








puis plus loin le passage par un petit col (non nommé sur la carte), après lequel on aperçoit à nouveau les sommets
ainsi que le Pog de Montségur,
avant de descendre sur Montferrier, atteint après presque 3 heures de marche,
toute l'étape s'effectue en sous-bois. Avec la chaleur ce n'est sans-doute pas plus mal, mais c'est lassant, voire même oppressant par moments. En particulier la remontée par le fond de la vallée encaissée après Montferrier en direction du col de Montségur m'aura paru bien longue.

Accessoirement, le balisage du GR fait maintenant rejoindre la route 800 mètres avant ce qu'indique la carte (et 70 mètres plus bas), et il faut donc parcourir un bon kilomètre de goudron surchauffé en début d'après-midi avant de bifurquer par le sentier vers le Pog de Montségur.
Arrivé au col après 1 heure 30 de marche, je retrouve la route, un grand parking sur lequel un car est en train de se garer, et quelques touristes se lançant dans l'ascension du Pog en plein cagnard par un sentier bien raide. Je n'ai pas le courage d'en faire autant. Si au moins il y avait une buvette! Heureusement le village de Montségur n'est plus loin (un quart d'heure de descente).

Bref je ne garderai pas un très bon souvenir de cette journée, que je termine fatigué bien qu'ayant en fait marché moins de 5 heures, pour environ 750 mètres de dénivelé ascendant et une distance de 17 km. Mais bon, ce n'est pas la première fois que je constate que, faute d'entraînement, la deuxième journée de rando est la plus pénible.

Après une bière réconfortante en terrasse du premier bistrot rencontré, je me mets à la recherche du gîte d'étape "Lou Sicret". Un panneau indique qu'il faut s'adresser à l'hôtel Costes, où le patron m'informe que, n'ayant pas d'autre réservation que la mienne, il a décidé de ne pas ouvrir le gîte ce soir, et me propose une chambre à l'hôtel pour le même prix. Mais je ne me plaindrai pas du supplément de confort! Apparemment, il n'a repris que récemment la gestion du gîte d'étape, qui ne semble pas trop le motiver - un groupe de randonneurs croisé lors de la première étape me l'avait d'ailleurs déconseillé, ayant trouvé le gîte sale et l'accueil désagréable. En revanche j'ai trouvé l'hôtel correct, la chambre propre et le lit confortable.

En fin d'après-midi, je retrouve mes nouveaux amis Norvégeo-Danois. Ils pensaient avoir réservé au gîte par téléphone, mais soit le gérant avait oublié de noter la réservation, soit il n'avait pas compris (j'ai pu constater que son anglais était pire que le mien). Finalement il leur a aussi proposé une chambre et la demi-pension au prix du gîte. Nous avons à nouveau dîné ensemble, et pas mal bavardé. Grâce à eux j'ai trouvé la soirée plus agréable que la journée. Je regretterai le lendemain de ne pas leur avoir demandé leurs coordonnées.

17 mai : de Montségur à Camurac

Le chemin traverse les champs en-dessous du village de Montségur. Après avoir traversé la rivière il monte par des lacets raides en sous-bois puis longe des pâturages. On grimpe ainsi jusqu'à 1060 m, pour passer la crête au-dessus d'un petit col, avant de redescendre en forêt par une vallée encaissée dominée de plus de 1000 mètres par la montagne de la Frau. Après être passé au hameau de Pélail, on arrive au confluent de la vallée de l'Hers, à 600 m d'altitude.

J'ai marché deux heures depuis Montségur. Je fais une première pause sur une aire de pique-nique ombragée au bord de la route qui mène jusque dans les gorges de la Frau. J'y rencontre deux randonneurs au long cours, partis d'Ax-les-Thermes avec le projet d'aller jusqu'à Nîmes en passant par Carcassonne et la Montagne Noire.

Puis deuxième pause au bout de la route, une bonne demie-heure plus tard, avant d'attaquer le chemin plus raide qui traverse les gorges.






Les gorges de la Frau sont impressionnantes par leur étroitesse et par la hauteur des parois qui les surplombent (plus de 400 mètres de paroi rocheuse par endroit, et un dénivelé de 1000 mètres depuis les sommets environnants). Mais contrairement à la croyance populaire l'origine de leur nom n'est probablement pas "l'affrau"  (la frayeur), mais plutôt un mot catalan signifiant "fracture".

Elles constituent la voie la plus courte depuis le pays d'Olmes vers les villages des hauts plateaux à la limite de l'Aude et de l'Ariège. Mais la tentative d'y construire une route fut abandonnée, les premiers ouvrages ayant été emportés par une crue.


Pourtant lors de mon passage la rivière est à sec, ou alors le peu d'eau qui coule est masqué par les éboulis qui encombrent son lit.
Le bon chemin qui longe les gorges grimpe de 350 mètres en un peu plus de 2 km, mais il est ombragé la plupart du temps, ce qui le rend agréable malgré la chaleur inhabituelle pour la saison. Il me faudra quand-même une bonne heure pour le parcourir, sans compter les arrêts photo.

Il est tracé nettement au-dessus du lit de la rivière, ce qui doit le mettre à l'abri des crues. Mais il est par endroits sujet aux éboulements, ce qui lui vaut d'être interdit l'hiver (selon le topo-guide du sentier cathare, qui indique un itinéraire de remplacement reliant directement Pélail au plateau de Languerail sans passer par les gorges et par Comus).
J'ai d'ailleurs vu tomber quelques cailloux dont l'un, heureusement pas bien gros, m'a frôlé. Mais d'autres blocs, tombés précédemment, étaient nettement plus impressionnants.


A la sortie de la portion la plus étroite des gorges, après une nouvelle pause, j'emprunte une petite route empierrée qui conduit jusqu'à Comus, puis la route goudronnée jusqu'à Camurac (1210 m), atteint 1 heure 30 plus tard - soit au total environ 5 heures 30 de marche depuis Montségur, pour un dénivelé ascendant de près de 800 m et une distance de 17 km.


Cette route marque pratiquement la limite entre les départements de l'Aude et de l'Ariège, dans un paysage de hauts plateaux faiblement vallonnés.
Comus et Camurac sont donc situés dans l'Aude, à quelques centaines de mètres près. D'ailleurs, à Comus, l'un des gîtes d'étape est situé de l'autre côté de la route, donc dans l'Ariège, ce qui lui vaut l'hiver de ne pas profiter du déneigement par les engins de la commune de Comus pour les cinquante mètres de route qui y conduisent depuis la départementale (concurrence malsaine ou rivalité locale? Il faut dire que le nombre de gîtes de de chambres d'hôtes annoncés par des panneaux est impressionnant pour un si petit village).

M'étant arrêté longuement à plusieurs reprises depuis Pélail, je pensais être rejoint avant Comus par le couple scandinave que j'avais quitté à Montségur après le petit-déjeuner sans leur dire au-revoir. Mais même après avoir attendu un moment à Comus, je ne les aperçois toujours pas. J'en suis désolé car je sais que je ne les reverrai pas : ils vont dormir à Comus pour continuer par le sentier cathare, qu'ils comptent suivre jusqu'à rencontrer le GR36 qui les conduira jusqu'à Carcassonne, alors que je bifurque vers le sud et la haute Ariège.

J'ai choisi d'aller jusqu'à Camurac pour raccourcir un peu l'étape du lendemain, qui promet d'être longue. Je ne le regrette pas, car l'accueil par Alain au gîte d'étape "La Marmite" est des plus sympathiques. J'y suis le seul hôte, ce qui me vaut d'y manger (et vider un bon pichet de vin) en tête à tête avec lui et de profiter de sa connaissance de la région et de la vie (et des petites histoires) des villages du haut-plateau, dont il parle avec humour. Il est installé à Camurac depuis 3 ans, mais connaît le gîte depuis 15 ans car il assurait l'intendance de randonnées équestres qui y faisaient étape. Il en a repris la gestion lorsque son propriétaire, âgé, a souhaité arrêter son activité.

18 mai : de Camurac à Orlu


Depuis le début de la semaine, la météo annonçait un changement de temps pour ce jeudi, avec un net rafraîchissement et l'arrivée de la pluie. Celle-ci n'est maintenant annoncée que pour l'après-midi dans le secteur d'Ax-les-Thermes. J'essaie donc de partir assez tôt pour l'éviter, d'autant que l'étape est longue : le gîte d'étape des Forges d'Ascou étant situé à plus de 3 km du GR, j'ai décidé d'aller plutôt jusqu'à Orlu.

Le ciel s'est couvert pendant la nuit, je pars à 8h sous un plafond bas, en espérant que le soleil finira par percer. De Camurac je rejoins l'itinéraire normal du GR107 à Montaillou par une petite route agricole.

Montaillou est connu par la page de son histoire liée au catharisme, qui a laissé des écrits "grâce" au zèle mis par les inquisiteurs à enquêter sur la vie de ses habitants pour pourchasser les derniers Cathares (ceux qui n'avaient pas encore fui vers la Catalogne via le chemin des "Bons-Hommes") et à en transcrire les interrogatoires, ce qui a permis à l'historien E. Le Roy Ladurie d'en tirer son ouvrage "Montaillou, village occitan de 1294 à 1334".


De Montaillou ( au premier plan, avec Camurac au fond sur le plateau et dans la brume), le chemin monte vers le col de Balaguès (1670 m), où j'arriverai après un peu plus de 2 heures de marche.
Passé les 1500 m d'altitude le ciel semble s'éclaircir, et j'ai la bonne surprise d'arriver au col face à un vaste panorama sur les Pyrénées (si vous ne vous en êtes pas encore aperçu, vous pouvez agrandir les photos en cliquant dessus, voire mieux, ouvrir le lien dans un nouvel onglet pour pouvoir les afficher dans leur format original)
Du col de Balaguès, un long cheminement à travers le plateau permet de continuer de profiter de la vue au-dessus de la mer de nuages (ci-contre vers le massif du Tabé au nord-ouest): d'abord en descente puis à peu près à l'horizontale jusqu'au col de Pierre-Blanche (1550 m, à proximité du refuge du Chioula), avant de remonter jusqu'au col d'Ijou (1650 m, 1 heure 30 de marche après le col de Balaguès).
Je m'arrête au col d'Ijou pour casser la croûte face aux Pyrénées de plus en plus ennuagées, avant d'entamer la descente vers Sorgeat.
Celle-ci se fait par un bon sentier, d'abord en sous-bois, puis dans des pentes raides et déboisées (et en partie brûlées). L'itinéraire balisé fait ensuite un long détour vers l'est par une petite route conduisant à Sorgeat avant de bifurquer vers Ascou, sensiblement à l'horizontale. Il y aurait certainement moyen de gagner une demie-heure en descendant directement sur Ascou à travers champs, mais la carte au 25000e n'indique pas de sentier et il faudrait traverser des propriétés clôturées.
Le ciel s'est fait plus menaçant, et lorsque je m'arrête à Sorgeat (après 1 heure 15 de descente) il tombe quelques gouttes de pluie. Heureusement celle-ci ne s'intensifiera pas. Malgré tout je ne traîne pas trop, car après Ascou il me restera encore 1 heure 30 de marche pour atteindre Orlu.

D'Ascou, l'itinéraire plonge au fond de la vallée par une petite route conduisant à un pont près d'un ancien moulin joliment restauré, ainsi que les maisons du hameau de Fournit (ci-contre avec le village d'Ascou au fond), puis remonte par un bon chemin jusqu'à la Porteille (col à 990 m).
De là, un sentier de chèvre descend par une pente raide vers Orgeix, où il ne reste plus que 2,5 km à plat dans la large vallée de l'Oriège pour atteindre Orlu (840 m). Il m'aura fallu en tout 6 heures 30 de marche, pour près de 25 km et un dénivelé ascendant de 700 m. 

L'arrivée au gîte d'étape d'Orlu ("le Relais Montagnard") est une déception. Celui-ci fait partie d'une grosse structure logée dans une bâtisse en béton des années 1960 ou 70, appartenant à la commune et comprenant également un restaurant et un bar. Ceux-ci étant vides en cette saison, l'effet est assez sinistre, et la partie gîte encore plus : seuls les dortoirs tristounets et les sanitaires sont accessibles, les cuisine et autres pièces communes étant fermées à cause des travaux en cours. La gérante actuelle a repris la structure en l'état l'année dernière sans avoir pu en obtenir préalablement un bilan, constaté que l'ancien gérant avait emporté une bonne partie du matériel et du mobilier, et doit se battre avec le propriétaire des murs (la mairie) pour qu'il fasse les travaux de rénovation et de remise aux normes nécessaires. 
Je suis à nouveau le seul hôte, mais dans des conditions beaucoup moins sympathiques que la veille... D'autant plus que je m'aperçois que l'accès du gîte au restaurant par l'intérieur du bâtiment est fermé (toujours les travaux), et dois passer par l'extérieur sous une pluie battante pour aller manger. Entre temps, la gérante ayant fermé l'entrée du bar-restaurant, je suis confiné dans le dortoir, le temps m'empêchant de rester dehors. Quant à la qualité du repas (sans aucun produit frais), no comment... Espérons que c'est mieux lorsque le restaurant est ouvert. Pour couronner le tout, le prix de la demi-pension, le plus élevé de ceux rencontrés depuis mon départ de Foix.
Seul point positif, le pain frais commandé par la gérante est livré à 8 h le matin, et le petit-déjeuner ainsi que le sandwich à emporter (pas gratuit non plus, celui-là !) seront bien meilleurs que le repas de ce soir.

19 mai : d'Orlu à Ax-les-Thermes


La météo avait prévu une éclaircie pour ce matin. Vu ce qu'il est tombé pendant la nuit je n'y croyais guère, mais elle ne s'était pas trompée. Ne sachant pas combien de temps cette éclaircie va durer (de la pluie, et de la neige en altitude, étant à nouveau annoncées vers midi), j'aurais préféré partir plus tôt, mais la gérante du gîte m'a convaincu d'attendre le pain frais promis pour le petit-déjeuner.
Je pars néanmoins de bonne humeur vers 8h30 et rejoins rapidement le GR par le chemin en fond de vallée. Il fait fais (depuis la veille j'ai remis le tee-shirt en laine à manches longues, et j'y ai ajouté un gilet en polaire que je n'enlèverai qu'en cours de montée). Les pentes au-dessus de 1700 m se sont saupoudrées de blanc pendant la nuit.

L'itinéraire balisé suit la route carrossable de Gouzy, à mi-chemin d'Orlu et d'Orgeix (la carte IGN au 25000e n'est pas à jour), et rejoint vers les 1000 m d'altitude l'ancien tracé, c'est-à-dire la route qui mène d'Orgeix jusqu'à un large vallon perché entre 1300 et 1400 m (ruisseau de la vallée d'Orgeix). La bifurcation vers le col de Joux, par lequel je suis censé rejoindre Mérens-les-Vals, se situe après une cabane, à 1300 m. J'y arrive au bout de 2 heures. 
Mais les nuages se sont de nouveau accrochés à la crête et me font craindre de l'atteindre avec la pluie, voire la neige, et en tout cas dans le brouillard. J'hésite un moment, et me décide à suivre la route pour atteindre un endroit où la vallée s'élargit, offrant une belle vue sur les hauts sommets qui la ferment vers le sud.


Je m'arrête vers 11 h devant la cabane de l'Agnelle Morte (jolie petite cabane ouverte aux randonneurs, très propre, avec une belle cheminée, du bois et de l'eau à volonté aux alentours) pour profiter du paysage en espérant que les nuages vont se dissiper.


Et c'est bien ce qui finit par arriver...
Nouvelle hésitation : j'ai perdu une heure (ou profité d'une heure dans ce cadre idyllique), mais j'ai encore largement le temps de reprendre l'itinéraire prévu jusqu'à Mérens. Si seulement j'étais sûr que ça en vaut la peine... En effet les nuages sont toujours présents sur la crête derrière moi.
Bref, je finis par me convaincre que ça ne m'apportera rien, à part le risque d'arriver trempé dans un village désert (pas de bistrot et pas de tabac alors que je viens de fumer le dernier cigarillo de la seule boîte que j'avais emportée) dans lequel je devrai attendre le train jusqu'à 20 h. A midi, ma décision est prise, je vais descendre à Ax-les-Thermes, où l'attente sera moins pénible.

La descente vers Orgeix offre encore de jolies échappées vers la dent d'Orlu, que je n'avais pas pu photographier le matin à cause du contrejour.
D'Orgeix à Ax j'emprunte l'itinéraire de randonnée en rive gauche de l'Oriège, agréable au début, plus fastidieux en arrivant aux abords de la ville thermale, d'autant que le ciel est maintenant bien gris. J'arrive à Ax vers 14h30 (j'aurai quand-même marché 5 heures aujourd'hui). Je trouve un tabac ouvert et un café sur la place devant la mairie. Et une fontaine d'eau chaude (et sulfureuse) qui, à défaut de douche, me permettra au moins de me laver les pieds avant de mettre des chaussettes propres en prévision du voyage : faudrait pas que j'incommode mes voisins de couchette.
L'après-midi me paraîtra quand-même longue, surtout avec la perspective du retour vers la région parisienne et, malgré les lourds nuages qui se sont accumulés sur les sommets et la pluie qui arrive, une petite déception de n'avoir pas été jusqu'au bout de mon projet (d'autant plus que, comble pour un randonneur, c'est peut-être l'absence de tabac qui a fait pencher la balance).

Malgré cette impression d'inachevé, j'ai beaucoup apprécié cet itinéraire, qui permet d'approcher progressivement les hauts sommets pyrénéens en proposant une grande variété de paysages depuis le piémont. La seule étape qui m'a moins séduit est celle qui conduit de Roquefixade à Montségur, mais c'est une question de goût (je ne suis pas un grand adepte des randonnées en forêt).
C'était un bon choix pour la saison, et une bonne introduction avant d'entreprendre la traversée des Pyrénées Orientales par le GR10 à partir de Mérens-les-Vals. Mais ça vaudrait aussi la peine de poursuivre le chemin des Bonshommes jusqu'à Berga en Catalogne (une dizaine de jours au total), en partant à une période où les cols entre 2000 et 2500 m sont praticables sans danger, et en choisissant d'en faire les variantes plus montagnardes, en particulier entre Mérens et Puymorens puis le passage par la Portella Blanca à la triple frontière avec Andorre et l'Espagne.

1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Merci pour ce compte-rendu très intéressant et ces photos.
    Fin mai et début juin 2018 je suis allé, avec mon âne Pito, sur le GR 107 depuis Comus. Mon intention était de faire l'aller et retour. Pito porte l'essentiel de mon bagage. Nous marchons 8 à 10 heures par jour,pose méridienne comprise. Je pratique le bivouac la plupart du temps, seul un fort mauvais temps persistant m'amène à fréquenter un gîte d'étape ou un camping si j'en trouve.
    Et cette fois, question mauvais temps, Pito et moi avons été particulièrement servis ! Au point qu'après 12 jours j'ai dû renoncer à Gosol, une étape avant Berga !!! J'ai regretté que la partie catalane soit moyennement balisée - avec parfois des indications masquées (volontairement par les autorités régionales ?)
    J'avais aussi renoncé à la voie hivernale, la neige était encore trop épaisse sur le GR, J'ai fait le détour. De la pluie tous les jours, des sentiers transformés en ruisseaux ou en torrents formant de long gués aussi inattendus que glaciaux ! Et les ânes n'aiment pas les gués ! Un névé fort pentu à traverser : une belle trouille ! De la boue évidemment...
    La tente mouillée le matin réinstallée le soir : un cauchemar comme jamais je n'avais eu (j'ai 71 ans et de nombreuses randonnées au compteur...).
    Mais pas guéri, je compte bien récidiver en juin 2019, sur le même itinéraire mais en prenant soin de consulter la météo pyrénéenne avant de partir.

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